Des membres de l’Armée nationale libyenne qui tenaient l’est du pays ont affronté, jusqu’en octobre dernier, l’armée du Gouvernement d’accord national (Abdullah DOMA/AFP)

 

Le Gouvernement d’union nationale en Libye prend ses marques. Après une guerre civile quasiment ininterrompue depuis la chute de Mouammar Kadhafi dans la foulée du « printemps arabe » de 2011, le cabinet unifié d’Abdel Hamid Dbeibah s’est vu remettre mardi le pouvoir, lors d’une cérémonie à Benghazi, par le gouvernement dirigé par Abdellah al-Theni.

Ce dernier contrôlait l’est du pays avec l’appui de l’Armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Khalifa Haftar. Leur rival, le Gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj, basé à Tripoli et qui tenait l’ouest du pays, avait lui aussi remis le pouvoir la semaine dernière au gouvernement Dbeibah.

Une réconciliation sous l’égide de l’ONU
Depuis des années le GNA, reconnu comme légitime par l’ONU mais soutenu militairement par la seule Turquie avec des mercenaires syriens, affrontait militairement les troupes de Khalifa Haftar, soutenues par des mercenaires russes ainsi que, financièrement, par l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l’Egypte. Les troupes du GNA ont infligé revers sur revers à l’ANL, grâce notamment aux drones turcs, l’été dernier, mais n’ont pu la vaincre complètement.

Après un cessez-le-feu, en octobre, qui avait tenu bon à l’inverse de ses innombrables prédécesseurs, le processus de réconciliation nationale a connu une accélération décisive lors de discussions à Genève, en février , sous l’égide de l’ONU. L’accord prévoyait aussi le départ de toutes les troupes étrangères, mais des milliers de mercenaires sont encore déployés en Libye. Le Parlement a accordé sa confiance le 10 mars à ce nouvel exécutif unifié, un vote qualifié « d’historique ».

Paris rouvre son ambassade
Ces dernières semaines, à la faveur de l’embellie politique, certains pays ont annoncé qu’ils allaient prochainement rouvrir leur ambassade à Tripoli, comme Malte et l’Egypte. Paris va rouvrir lundi son ambassade, fermée en 2014 en raison de l’insécurité, a annoncé mardi le président Emmanuel Macron, après avoir reçu le président du conseil présidentiel libyen Mohammed el-Menfi. L’ambassadrice Béatrice Le Fraper du Hellen, qui assure la mission depuis Tunis, reviendra dans la capitale libyenne, où la majorité des ambassades européennes sont closes, sauf, depuis 2017, l’italienne. Le dossier libyen sera aussi sur la table du sommet européen de ce jeudi.

La reconstruction de la Libye est un sujet clé pour les Européens, notamment la France et l’Italie qui ont été très impliqués dans la crise, car le pays est situé sur la « r oute centrale » très fréquentée par les migrants d’Afrique subsaharienne pour accéder à l’Europe. Il est aussi le deuxième producteur de pétrole d’Afrique, mais détient les plus importantes réserves prouvées du continent et les neuvièmes au niveau mondial, avec 3 % de l’ensemble. Le pétrole fournit la totalité des recettes en devises du pays et les trois quarts des recettes budgétaires des diverses entités prétendant représenter l’Etat. Quoiqu’affectée par les combats ces dernières années, la rente pétrolière fait l’objet de rivalités acharnées entre milices, mais aussi acteurs internationaux, notamment européens. Se pose notamment la question du contrôle des revenus pétroliers de la National Oil Corporation, alors que le pays compte deux banques centrales rivales.

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